Médiation

Qu’est-ce que la médiation ?

La médiation est un procédé de traitement des conflits, dans lesquels des tiers impartiaux soutiennent les parties en conflit afin qu’elles trouvent des solutions à l’amiable à leurs différends. Les parties décident elles-mêmes des alternatives et des résultats dans des négociations auxquelles elles participent de leur plein gré et en toute confidentialité.

La médiation existe depuis des dizaines d’années de manière volontaire, c’est-à-dire que les deux parties doivent en accepter le principe. En matière d’affaires familiales, les bénéfices de la médiation sont nombreux : moins de souffrance, moins de conflit, procédure plus courte et moins onéreuse, et des enfants qui s’en portent mieux.

« L’objectif est de limiter l’impact d’un divorce sur les enfants. Car aujourd’hui, les experts estiment que dans 15% à 20% des cas, les séparations mettent gravement en péril la santé des enfants. L’an dernier, 17’000 divorces ont été prononcés en Suisse. »

(Le Temps, 10 juin 2022)

Les parents souhaitant mettre en place une médiation trouveront des médiateurs sur le site de la Fédération Suisse des Associations de Médiation ou auprès de sociétés de service d’aide à la séparation ou au divorce par l’obtention d’un accord à l’amiable (nous recommandons par exemple en Romandie Divorce Amiable que nous connaissons bien. Nous avons également connaissance de Divorce.ch

Bien entendu, si l’une des deux parties refuse la médiation ou ne joue pas le jeu durant celle-ci, elle ne pourra pas démarrer ou échouera assez vite. Pour cette raison est apparue la médiation ordonnée (détaillée ci-dessous), moins connue à ce jour mais en pleine expansion. La médiation ordonnée consiste à rendre la médiation obligatoire comme première étape dans les séparations. C’est ce qu’ont fait les institutions d’un nombre croissant de pays, avec d’excellents résultats.

« En Suisse, la possibilité de résolutions de conflits par la médiation est admise dans les procédures de divorces, les tribunaux contrôlant et ratifiant les conventions établies lors de la médiation. Bien qu’un nombre croissant de parents ait recours à la médiation, et que les résultats sont généralement très positifs, ce n’est que ceux qui sont suffisamment d’accord pour trouver des solutions ensemble qui y adhèrent. N’étant pas obligatoire et dès le début de la séparation, les parents en conflits aigus ne voient pas l’intérêt de la médiation, qui peut être refusée par l’un d’eux. »

(Patrick Robinson, représentant de la Coordination romande des organisations paternelles (CROP) auprès de GeCoBi)

« Il n’est pas inutile de rappeler que lors de la révision du droit du divorce de 2000, c’est le Parlement qui a biffé l’article qui devait donner l’accès à la médiation et ouvrir la voie à une juridiction spécialisée pour des tribunaux de la famille. «Les propositions ont été rejetées par le Parlement sous prétexte que la promotion de la médiation familiale représentait une concurrence déloyale pour les avocats et que la prescription de la Confédération de tribunaux des familles aurait constitué une ingérence dans un domaine relevant de la souveraineté des cantons. Si cette compétence leur appartenait bel et bien, il faut remarquer qu’aucun n’en a fait usage jusqu’ici ».

(Rolf Vetterli, Président, II ème chambre civile, Trib. cantonal de St-Gall – 2006)

Depuis la prise de position ci-dessus de 2006, et malgré la résistance de la corporation des avocats, est intervenu l’arrêt 5A_852/2011 qui permet à un tribunal d’ordonner une médiation, possibilité dont les tribunaux ne se sont pas saisi massivement à ce jour.

Définition et objectifs de la médiation familiale

Le rôle de la médiation familiale est d’amener les parties à trouver elles-mêmes les bases d’un accord durable et mutuellement acceptable, tenant compte des besoins de chacun et particulièrement de ceux des enfants dans un esprit de co-responsabilité parentale.

« La médiation familiale, notamment en matière de séparation et de divorce, est un processus de gestion des conflits dans lesquels les membres de la famille demandent ou acceptent l’intervention confidentielle et impartiale d’une tierce personne, le médiateur familial. »

La médiation familiale aborde les enjeux de la désunion, principalement relationnels, économiques et patrimoniaux.

Ce processus peut être accessible à l’ensemble des membres de la famille (ascendant, descendants, collatéraux) concernés par une rupture de communication dont l’origine est liée à une séparation.

Il existe aussi des principes selon lesquels la médiation familiale doit s’exercer. En effet, le médiateur doit veiller à garantir la confidentialité de la démarche, la non-violence physique et verbale. Dans cet optique, il doit poser un cadre des discussions et le rappeler avec fermeté lorsque nécessaire. Il doit être garant de l’égalité des places et faire preuve d’indépendance, de neutralité et d’impartialité. Finalement, le médiateur n’a pas à imposer de décision et encore moins trancher le différend. Ce n’est donc pas un arbitre.

Pour approfondir le sujet, nous vous invitons à consulter les sites de l’Association Pour la Médiation Familiale et de la Fédération Suisse des Associations de Médiation ou à lire les livrets publiés par l’Association Pour la Médiation Familiale intitulé «Pratique éthique de médiation familiale».

Le droit collaboratif


Le droit collaboratif est une forme de médiation non ordonnée que nous valorisons. Une médiation non ordonnée est donc une médiation que les parents mettrons en place eux-même en sollicitant un avocat médiateur formé au droit collaboratif.

Le droit collaboratif est un mode alternatif de résolution des conflits qui nous vient des Etats-Unis et qui a vocation à s’appliquer dans tous les systèmes juridiques et pour toutes les cultures. Le mouvement de droit collaboratif en Suisse Romande est né en 2009 à Genève.

Il s’agit d’un moyen efficace et économique permettant de trouver une issue équitable et satisfaisante à un conflit avec l’assistance d’avocats mais sans saisine des tribunaux pour trancher le litige.

Nous conseillons aux couples en instance de séparation d’envisager le droit collaboratif.

Il y a 83 avocats formés au droit collaboratif en Suisse romande au 1er novembre 2022. L’immense majorité des séparations et divorces réalisés par le droit collaboratif est couronnée de succès avec satisfaction des deux parties, alors que via un procès, les deux parties sont le plus souvent insatisfaites (avec les conséquences que l’on connaît sur le bien-être des enfants, le conflit perdurant).

La réalisation d’une séparation ou d’un divorce (avec tous ses aspects tels que partage du temps avec les enfants, pensions, partage des biens …) par le droit collaboratif présuppose un état d’esprit de recherche de solutions par les deux parties (les deux parents). 

« Chaque partie indique ses besoins et cherche les intérêts communs. L’avocat permet de les définir et entend ceux de l’autre partie. Il ne s’agit pas d’arriver à un compromis mais d’arriver à une situation satisfaisante pour tous. C’est une variante de la médiation. »

(Christophe Imhoos, avocat et fondateur de l’Association romande de droit collaboratif)

Plus d’information sur le site du Droit Collaboratif Romand et dans notre dossier droit collaboratif.

La médiation ordonnée

Une médiation ordonnée est décidée par les institutions, comme phase initiale de la procédure. Un tribunal peut ordonner une médiation (arrêt 5A_852/2011). De nombreuses voix s’élèvent pour demander la mise en place de la médiation obligatoire.

La médiation ordonnée, en expansion actuellement, existe cependant depuis de nombreuses années. Voici quelques informations datant de 2009:

  • En Norvège, la médiation est obligatoire lorsque les enfants ont moins de 16 ans. Dans 40% des cas, la médiation s’est révélée superflue et dans 40% elle a permis de trouver une solution.
  • Au Pays-Bas, un projet pilote (1999-2003) a montré qu’un accord avait été trouvé dans 61% des cas par une médiation ordonnée avant la procédure judiciaire et dans 78% des cas pendant la procédure judiciaire.
  • En Grande-Bretagne, la loi oblige les avocats à adresser les parents à un médiateur. Une aide financière, voire la gratuité, peut être obtenue.
  • Suisse : Les expériences de médiation ordonnée, menées à Bülach/ZH autour de 2005, se sont révélées très positives.

A Berne, Mme Lilo Staub, Dr en psychologie, aidée d’un juriste, a élaboré un modèle d’ordonnance d’une consultation obligatoire. Basé sur le droit en vigueur depuis 2000, il s’inspire de la médiation ordonnée.

La CROP avait calculé en 2009 que des mesures telles que la médiation ordonnée coûteraient à la collectivité 16 millions de francs, alors qu’elles permettraient de réaliser des économies de 300 millions.

Un appel spécial a été adressé par le Conseil de l’Europe entre autres au pouvoir législatif suisse le 2 octobre 2015. L’assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe a adopté à l’unanimité (incluant donc ses deux parlementaires suisses) la résolution 2079 sous le titre « Egalité et coresponsabilité parentale : le rôle des pères » .

« 5.9: à encourager et, le cas échéant, à développer la médiation dans le cadre des procédures judiciaires en matière familiale impliquant des enfants, notamment en instituant une séance d’information obligatoire ordonnée par un juge, afin de sensibiliser les parents au fait que la résidence alternée peut être la meilleure option dans l’intérêt supérieur de l’enfant, et de travailler en faveur d’une telle solution, en veillant à ce que les médiateurs reçoivent une formation appropriée et en favorisant une coopération pluridisciplinaire inspirée du modèle dit de «Cochem»».

(Article 5.9 de la résolution 2079 (2015) de l’assemblée parlementaire du conseil de l’Europe)

La méthode Cochem

La méthode Cochem (également nommée pratique de Cochem ou encore « modèle de consensus parental ») est une forme de médiation ordonnée. Cette méthode née en 1992 dans la ville de Cochem en Allemagne pousse les parents à s’entendre dès le début du processus de séparation. Tous les acteurs de la séparation (parents, avocats, APEA, juges, médiateurs, psychologues …) travaillent ensemble dans le but de trouver un accord qui évite à l’enfant de souffrir.

« Avocats, ayez la sensibilité de remettre l’enfant au centre des préoccupations. Vous pouvez faire de la bonne prévention en amont. »

(Dre Alessandra Duc Marwood, psychiatre, médecin ajoint au centre de consultation Les Boréales, unité du CHUV)

Les expériences faites dans plusieurs pays (Allemagne, Autriche, USA, Canada, Grande Bretagne, Pays-Bas, Norvège), démontrent que la médiation-cooperation ordonnée permet aux parents en conflits de réduire leurs conflits et de développer leurs capacités de coopération et de coresponsabilité parentales avec des effets positifs sur leurs enfants. Le modèle de coopération ordonnée développé depuis une vingtaine d’année avec succès à Cochem en Allemagne démontre que les parties concernées (parents et enfants) doivent pouvoir se faire aider par des intervenants spécialement formés à ce type de médiation. Un élément qui a fortement influencé le succès de cette approche est que la coopération soit ordonnée et le processus entamé très rapidement (dans les 15 jours) suite à une décision de séparation. Les autorités y voient un avantage pour réduire la possibilité d’enlisement ou d’aggravation des conflits.

«Tout ce qui encourage le dialogue doit être proposé, voire imposé. Je préconise un changement de notre pratique, une prise de conscience que le bien-être de l’enfant fait partie de l’intérêt de notre client»

(Irène Wettstein, avocate veveysanne)

Sont mises en place des sessions d’information, de sensibilisation à la séparation, un accompagnement à la coparentalité, une médiation (les cinq premières séances étant financées par le canton) et dans de rares cas une thérapie ordonnées par le juge si nécessaire. Les enfants de plus de 6 ans sont invités à un entretien personnel avant l’audition de leurs parents, symbolisant la priorité mise sur l’enfant. Des psychologues et des médiateurs accompagnent les parents dès le début du processus.

Une clef importante du grand succès de la pratique de Cochem, aujourd’hui déployée dans toute l’Allemagne, réside justement dans le fait que le Juge aux affaires familiales envoie en médiation (conseil de vie) des parents en conflit même contre le gré d’un des parents.  Pour le parent le plus récalcitrant, il se voit envoyé en thérapie et son éventuel refus de collaborer est considéré comme un manque de capacité parentale voire une éventuelle maltraitance envers les enfants pouvant entraîner un refus de garde.

La méthode de Cochem est en place en Belgique à Dinant.

Intégration du modèle de consensus (Cochem) en Belgique Marie-France Carlier, juge du Tribunal de la famille de Dinant, Belgique (Luxembourg 2016)

Elle a été mise en place en 2016 dans le canton de Bâle-Ville où les parents en désaccord sont depuis envoyés en consultation, 75% d’entre eux trouvent des solutions à l’amiable. Elle a été également mise en place à St Gall (depuis au moins mars 2012).

Elle a été mise en place en Suisse romande pour la première fois en janvier 2020 en Valais, dans le district de Monthey. Le succès est au rendez-vous avec 63% en 2020 et 78% en 2021 des médiations qui ont débouché sur un accord complet ou partiel. Les avocats valaisans y participent et utilisent des formulaires de requêtes simplifiés (adaptés au modèle de consensus parental) qui permettent de communiquer en laissant moins de place aux éléments subjectifs, ou au dénigrement ou aux attitudes peu respectueuses.

« Le nombre d’accord est très élevé et la durée de la procédure a diminué, de même que la nécessité d’enquêtes sociales ou d’expertises psychojudiciaires. »

(Camille Rey-Mermet, Juge au tribunal cantonal)

Suite au succès de ce pilote, le modèle de consensus parental a été étendu début 2022 dans les districts de Martigny, d’Entremont et de Saint Maurice.

D’autres cantons projettent de mettre en place ce modèle, comme Neuchatel. Mais aussi Fribourg qui prévoit d’étendre le consensus parental sur tout le territoire fribourgeois en juin 2027, après une phase pilote prévue en 2026 dans les districts de la Glâne, la Veveyse et la Gruyère. Un projet pilote a été mis en place pour une durée de deux ans dans le canton de Vaud en janvier 2023 dans l’Est vaudois (districts de la Riviera-Pays d’en-Haut, de Lavaux-Oron et d’Aigle). Si les résultats sont positifs, il devrait être étendu à l’ensemble du canton de Vaud.. Le Service Social International Suisse (SSI Suisse) participe à l’élaboration et au montage de ce pilote dans le Canton de Vaud, comme il le fait déjà pour le canton du Valais. Il est mandaté par l’Ordre judiciaire vaudois et la Direction générale de l’enfance et de la jeunesse pour coordonner et conseiller les instances et professionnelles parties prenantes au pilote pour établir un mode opératoire pour son application.

« Le dialogue est encadré par une tierce personne neutre qui n’est pas là pour trancher le conflit, mais pour accompagner les parents dans la recherche de solutions respectant leurs besoins et ceux de l’enfant. »

(Laure Clivaz-Strehmel, présidente de l’association valaisanne de médiation)

Entretien débat de Me Sydney Kamerzin, du MCPVs et de la CROP (49 minutes)

Tribunal de la famille

Un tribunal de la famille est un tribunal qui est spécialisé dans les affaires familiales (divorces, gardes d’enfants …) Actuellement, seul le canton d’Argovie a un Tribunal de la famille unifié.

L’association Avenir Familles, propose la création d’une commission de conciliation, comme cela se fait pour les baux et loyers ou aux Prud’hommes. Cette proposition a été portée fin 2021 à la commission des affaires juridiques par le conseiller national socialiste Christian Dandrès (GE) dans le cadre de la révision du Code de procédure civile (postulat 22.3380 « Pour un tribunal de la famille »). Il demande que les cantons soient incités à instituer une commission de conciliation ainsi qu’un Tribunal de la famille. En effet, aujourd’hui, les contentieux familiaux représentent la majorité des procès civils en Suisse, constate Avenir Familles. Cela a des coûts sociaux et de santé.

Jean Zermatten, ex-président du comité de l’ONU des droits de l’enfant considèrant que le modèle de Cochem n’est pas suffisant, prône la création d’un Tribunal de la famille, composé de juges spécialisés pour faire face à des situations toujours plus complexes.

« Le système actuel a des limites, il manque de spécialisation, il y a une certaine urgence à réformer », a-t-il déclaré dans La Matinale. »

(Jean Zermatten, ex-président du comité de l’ONU des droits de l’enfant)

Les actions de la CROP en rapport avec la médiation :

En savoir plus :

Bibliographie :

Le Livret « Pratique Éthique de médiation familiale » est l’un des textes reprenant les fondements éthiques de la médiation familiale tels que pensés à l’APMF. C’est à ce titre un de nos textes fondateurs, avec le Code de Déontologie et nos statuts.

  • Protection de l’enfance. Lettre ouverte à tous ses acteurs (Isabelle Vuistiner-Zuber, avril 2019)

« Le divorce est un délicat exercice de transition vers un cadre de vie différent, en particulier quand des enfants sont présents. Sans s’en rendre compte, on peut se mettre à glisser vers quelque chose d’ingérable et source d’une souffrance intense.

Etre attentif à ses propres réactions suite à la rupture, donner aux enfants un surcroît d’attention au moment où l’on se trouve soi-même en déséquilibre, connaître les structures et les procédures qui peuvent nous soutenir ou savoir comment s’en défendre, cet ouvrage se veut d’abord un guide à l’attention des parents.

Les huit témoignages recueillis expriment avec force combien ces situations de tension peuvent nous marquer.

Dans ce vertige de séparations scabreuses, il convient de questionner la pratique des professionnels et des si mal- aimées APEA, afin d’obtenir le respect absolu du droit des enfants à être élevés par leurs deux parents.

Je veux croire en cette capacité d’autocritique et de remise en question de tous les acteurs de la protection de l’enfance. »

Isabelle Vuistiner-Zuber
  • Au nom de l’enfant … (Anne Reiser, Ed. Favre, Novembre 2012): Autorité parentale, nom de famille, pension alimentaire, chaque fois c’est au nom de l’enfant qu’hommes et femmes se livrent les luttes les plus acharnées lors d’une séparation. En justice, c’est également en son nom que ses parents s’opposent, surtout que sa naissance représente, pour celui qui cesse ou diminue son activité professionnelle, une perte d’autonomie financière. Le processus du démariage prévu par nos lois n’a-t-il pas un effet exactement contraire au but recherché, qui est de protéger la progéniture du couple désuni? Et en attendant les réformes espérées, l’avocate Anne Reiser livre aux couples des modèles de conventions qui leur permettront de clarifier et pérenniser leurs engagements, afin qu’ils puissent, le cas échéant, se séparer sans se déchirer.